La carrière du Docteur Paul
Le Docteur Paul, célèbre légiste
Le légiste dans la littérature et le cinéma
Le détective du scalpel ici |
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Le Docteur Paul à Vieux-Moulin.
© collection personnelle de madame Colette Pittard
Après la seconde guerre mondiale le Docteur Paul venait chaque week-end à Vieux-Moulin, il portait traditionnellement le béret basque ainsi que sa célèbre pèlerine. Chaque semaine depuis la villa des "Terres Fraîches" il se dirigeait avec sa canne à l'heure de l'apéritif à l'Auberge du Daguet.
Le rituel hebdomadaire du samedi et du dimanche midi était de rencontrer chez monsieur et madame Alain Coadou ses amis vieux-moulinois notamment Gaston Hazard menuisier, surnommé par le docteur "le père cercueil" ou encore Eugène Bessière, plombier-couvreur. Que de bons mots échangés entre eux avec l'humour spirituel du docteur Paul !
L'apéritif tradtionnel du Docteur Paul était la fameuse "Suze"...
Deux livres sur le Coker sont préfacés par le Docteur Paul :
A gauche : Le dressage du Cocker par E. Gand (1947)
Au centre : Le Cocker par O. Nourry (1958)
A droite : Olga Nourry
Préface du Docteur Paul sur le livre d'Olga Nourry
Septembre 1958
...Un jeune Coker noir et blanc, Punch, de l'élevage de mon ami Solières, fut offert à madame Nourry. Il n'était pas très beau, mais son intelligence, sa "cockerite" extrême, ont été pour beaucoup dans la prise du "Virus Canin" qui nous a donné aujourd'hui, la Vice-Présidente, la Directrice Générale du Spaniel-Club.
Après Punch, elle fonda un élevage basé sur les meilleurs sangs d'outre-manche. En fréquentant les expositions anglaises, elle connut et se lia d'amitié avec la célèbre éleveuse des Falconer's, Mrs Jamieson Higgens, qui lui prodigua les meilleurs conseils et encouragements , lui céda ses meilleurs sujets. C'est sur ces derniers que se créa l'élevage des "Terres Fraîches" à Vieux-Moulin.
En 1939, quarante Cockers vivaient heureux dans ce chenil, dans le parc des "Terres Fraîches".
"Les Terres Fraîches" rue Saint-Jean Vieux-Moulin (Oise)
Mais hélas, la guerre, l'invasion, arrivèrent. Et en mai 1940, après le passage des troupes, les bombardements, tous les chiens disparurent...
En l'espace d'une journée, toute une œuvre de plusieurs années, anéantie. Inutile de parler de la douleur de l'éleveuse qui aimait tant ses petits compagnons.
Avec un courage admirable, elle rechercha et récupéra des chiens de son élevage, cédés à des amateurs avant 1939, et dès que sa propriété occupée lui fut rendue ; elle reconstitua sa lignée des Falconer's.
... Finie ma préface, je dois maintenant au nom du Spaniel-Club Français, vous remercier chaleureusement et vous dire la reconnaissance d'un Club dont vous l'âme et aussi la cheville ouvrière.
Le "Cocker" que vous avez écrit, sera le chant triomphal du plus petit des Spaniels. Il apprendra comment on doit le comprendre, l'élever, l'aimer, l'utiliser et se laisse posséder par lui.
- Madame Colette Pittard indiquera plus tard qu'elle avait vu à Sully-sur-Loire lors de l'exode de 1940 trois de ses cockers emmenés par les troupes françaises.
A gauche : Le docteur Paul et sa petite fille.
Au centre : La propriété des "Terres Fraîches" vue du parc..
A droite : En arrière plan de sa petite fille le parc des "Terres Fraîches".
A gauche : Le chenil de l'élevage des Terres Fraîches en 1939 de madame Olga Nourry mère de madame Colette Pittard.
A droite : Le cocker "Vanille des Terres Fraîches", femelle blanche et orange.
A gauche :Falconer's Credit mère de Pavot des Terres Fraîches et de Violette des Terres Fraîches.
A droite : Namour des Terres Fraîches, le chien infirmier de l'Équipe chirurgicale et madame Olga Nourry avec la portée de Falconner's Cahaouchi la gagnante du concours à Paris en 1939.
A gauche : Les Terres Fraîche après la disparition des cockers lors de la débâcle de 1940. En 1949 l'élevage, sous l'impulsion de Mme O. Nourry et C.J. Pittard-Nourry, a repris sa production sur la descendance de ses meilleurs chiens : Falconers's Champagne, Falconers's Credit, Wilful Whipped Eggs et Mirabelle des Terres Fraîches, Tél : 11 à Vieux-Moulin.
A droite : Le cocker "Vanille des Terres Fraîches", femelle blanche et orange.
A gauche : Le Docteur Paul, Président du Spaniel Français, avec son vieux "Doggy" blanc et marron, à la fenêtre de son domicile parisien.
A droite : Le chenil du Docteur Paul à Vieux-Moulin.
Toutes les photos du chenil et des cockers ont été prises par monsieur Eugène Hutin.
"Cocker...nom prestigieux de cette boule soyeuse, colorée en vermeil par le soleil couchant de Sologne, qui dévale derrière un lapin, et s'en saisit, après le coup de feu, pour le rapporter triomphalement à son maître, même si celui-ci n'est pas l'auteur du meurtre !
Cockers...évocation des bonne soirées de chasse, où roulés sur vous-même, tout fumant dans l'âtre de la grande cheminée de la ferme, vous écouterez les récits de nos exploits, en clignant des paupières, avec d'autant plus d'appobation qu'ils sont plus fabuleux...
Cockers...mes petits compagnons, tapis au pied de mon bureau, se faisant humbles pour éviter l'expulsion ; mais qui d'un simple jappement d'une patte posée sur mon genou, me rappelez votre présence. Votre magnifique regard, à la fois si tendre et si impérieux d'affection, se plonge dans le mien pour me dire votre fidèle attachement.
Oh, mes cockers, êtres adorables, joies de ma vie âpre et difficile, on m'a demandé de parler de vous. Pour la première fois de mon existence, je regrette de ne pas être poète, pour chanter ce que vous êtes."
Ainsi commençait un article du Docteur Paul sur son chien préféré, traduisant la passion enthousiaste qui l'a uni à lui, la plus grande partie de son existence, jusqu'à sa fin (26 janvier 1960).
En effet, si pour tout le monde, le nom du Docteur Paul évoque le souvenir du grand médecin légiste universllement connu, lié à tous les proçès et affaires criminelles d'un demi-siècle, célèbre autant par ses dons déloquence, ses mots d'esprit, son solide bon sens que par sa bonté et sa profonde connaissance de l'humain, il est pour nous Canins, le grand Ami du Cocker et le défenseur des Spaniels.
Nommé membre du Comité du Spaniel-Club en 1905, il a vécu cette période du XXe siècle "des pionniers du cocker" faisant partie de cette pléiade de jeunes amateurs enthousiates, bataillant pour l'amélioration de la race, demandant et obtenant pour les Spaniels, les autres prérogatives aux autres chiens de chasse, organisant des field-trials nombreux pour prouver la valeur sportive des petits épagneuls anglais. Personnellement il proposait en 1907 des épreuves d'Essai sur le terrain des débutants, idée qu'il poursuivra plus tard en créant l'épreuve Saint-Hubert en novembre 1946 sous sa Présidence.
Le Docteur Paul est le créateur du fameux slogan :
- "le Beau et le Bon Spaniel", il ne voulait jamais séparer la qualité de la beauté.
- "Chasser avec un vilain cocker, indigne de la race, même brillant sur le terrain, autant chasser avec un corniaud" disait-il.
Il ajoutait : "Pourquoi cette obstination à croire qu'un beau Spaniel ne puisse être bon ; c'est absurde !".
En acquérant son premier cocker : Echo de Fontainebleau, en 1896, le jeune étudiant en médecine Charles Paul ne se doutait pas qu'il contractait une certaine maladie, qu'il dénomme par la suite, "ma cockérite chronique".
Réellement ce fut un fils d'Echo, son cher vieux Pinson qui provoqua le coup de foudre, pour la vie, entre l'homme et le cocker. Possèdant l'intelligence et toute la drôlerie de la race, il devint l'inséparable de l'étudiant, de l'interne des hôpitaux, l'accompagnant à la chasse, au quartier latin, à l'hôpital, à ses cours. Jamais l'un sans l'autre.
Et c'est probablement à cause de Pinson que l'élevage de Boulogne naquit, afin d'en avoir sa descendance. Ce chenil situé à Merlimont, près de Boulogne-sur-Mer, la ville natale de son propriétaire. Des importations y amenèrent des gloires d'Outre-Manche.
Lorsqu'un profane s'étonnait de ce sentiment qu'éprouvait un Praticien de la médecine légale pour un petit chien, alors que de son point de vue conformiste, celui-ci devait être fatalement un endurci, le Docteur Paul, avec son ironie souriante, lui expliquait ainsi :
"Si vous l'ignorez, je vous apprendrai que les Spaniels ont des origines espagnoles. On les nommait autrefois des "espagneuls". Des auteurs affirment qu'ils furent amenés par les Espagnols, lors de la conquête des Flandres par Charles Quint. Cette origine espagnole ne serait-elle pas un motif inconscient de notre amour mutuel, spaniels et moi ?? Pourquoi ? je m'explique : si un curieux étudiait mon pedigree, ses recherches arriveraient au premier des Paul : Paolo, dit Pablo - fils d'une belle (naturellement...) Flamande, séduite par un brillant conquérant espagnol..."
L'amusant de cette anecdote est que chacun sait que le Docteur Paul est le descendant de plusieurs générations de hauts magistrats.
En fait le Docteur Paul, cokerman invétéré, a aimé le chien "pour le chien".
Il a aimé et défendu tous les chiens, les comprenant et en les voyant pas comme des animaux inférieurs, les considérant comme les meilleurs animaux de l'homme. Lui, qui avait cotoyé tant de misérables, déclassés et criminels, disait souvent :
- "Le plus misérable n'est pas complétement perdu, s'il aime et est aimé d'un chien !"
Mais pour nous, Cochermen, se détache comme le plus pur cristal, ce sentiment qui unissait un grand homme à un petit chien - sentiment qui lui faisait écrire ces lignes, il y a quelques années :
Et si un jour - le plus tard possible - la prédiction de mon bon ami Thioller se réalise :
- "Toi mon vieux Paul, c'est avec un Cocker près de toi, que l'on te retrouvera un jour, mort au fin d'un bois".
- "Si cela arrive ainsi, ma fin sera douce".
Ce n'est pas tout à fait arrivé ainsi. Mais là où il repose, au milieu de cette belle forêt qu'il a tant parcourue avec eux, résonnent encore les aboiements de ses petits cokers qu'il a tant aimés.
A Vieux-Moulin en 1955 dans la rue Saint-Jean le docteur Paul et Olga Nourry se rendant dans leur villa des "Terres Fraîches".
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Chaque semaine le Docteur Paul se rendait à Vieux-Moulin, il ne manquait jamais au rituel hebdomadaire de boire son apéritf préféré une Suze à l'auberge du Daguet. Son ami Alain Coadou, propriétaire de l'établissement, confia en 1954 au peintre italien Vincent Cermignani, le soin de réaliser la fresque murale de la grande salle du restaurant sur laquelle est représenté le Docteur Paul, une tête de daguet à la main et un gigantesque couteau dans l'autre. Vincent Cermignani s'inspira pour cela de la salle des gardes du château de Pierrefonds.
Le Docteur Paul, commandeur de la Légion d'honneur, décédera à l'âge de 81 ans, le 26 janvier 1960 à son domicile parisien dans le VIIe arrondissement, il est enterré au cimetière de Vieux-Moulin.
Article paru dans "France - Soir" du Jeudi 28 Janvier 1960
100 rue de Réaumur Paris III
Médecin-Légiste mort hier d'une crise cardiaque à 81 ans.
Le Docteur Paul pouvait faire arrêter un boucher assassin et innocenter un suspect par le seul examen des coups de couteau.
"Docteur Paul, 52bis rue de Varenne... "
Les jurés de la Seine n'entendront plus cette phrase qui, depuis cinquante ans, faisait partie du rituel des assises de Paris. Ils ne veront plus ce gros homme souriant, à l'allure débonnaire, figure pittoresque et unanimement aimée dans les prétoires.
Le Docteur Paul est mort. Il s'est éteint hier matin à son domicile. Il souffrait depuis plusieurs semaines de troubles cardiaques et respiratoires. Il avait beaucoup maigri : de 120 kilos, son poids était tombé à 96 kilos.
Vendredi, au retour de la morgue, où il venait d'effectuer sa dernière autopsie (une femme victime d'un accident) il avait dit à un infirmier venu lui faire une piqûre : "J'ai du mal à respirer. Je n'en ai plus pour longtemps."
C'est ce même infirmier qui, hier matin, l'a trouvé mort. L'infirmier, monsieur André Sabaton, avait passé la nuit à son chevet. Avant de regagner son domicile, il entra avec la femme du malade, madame Cécile Paul, 81 ans, dans la pièce où reposait le Docteur Paul. Celui-ci ne respirait plus. Il venait de succomber. Il était 8 h. 15.
Il ne disait plus son âge
Le Docteur Paul avait 81 ans. Mais seuls ses amis le savaient. Depuis des années il avait une coquetterie : il ne disait plus son âge.
Quant à sa profession, c'était inutile : pas un juré qui ne sût qui était le Docteur Paul. Depuis 1906, il était expert auprès du tribunal de la Seine. Tous les matins de 8 heures à midi, son métier était de chercher comment survient la mort. Il arrachait leurs secrets aux cadavres de la nuit : asphyxie ou noyade, poignard ou revolver. L'après-midi, il était chez un juge d'instruction ou aux Assises, attendant le moment de comparaître. Chacun le saluait, même les passants qui venaient pour la première fois au Palais : ils avaient l'impression de le connaître.
Il était le fils de magistrat. Son père fut premier Président de la Cour de Cassation.
Ses 100.000 autopsies
Le Docteur Paul devait délaisser le droit pour la médecine. Mais la tradition familiale fut respectée, puisque à peine ses études achevées, il devenait un auxilliaire de la justice. Et quel auxilliaire !
Dès ses premières expertises, il montre sa compétence et son intelligence. Il est qu'un médecin, il est une sorte de "détective du scalpel". Ainsi il fait découvrir l'assassin d'un homme lardé de coups de couteau. Un suspect est interrogé mais le Docteur Paul proteste :
- "Cela ne peut-être lui !" dit-il.
- "Pourquoi ?"
- "J'ai examiné une par une les blessures. Elles n'ont pu être faites que par un homme sachant manier le couteau. Un boucher par exemple.
On l'écoute. Il a raison : le coupable est arrêté : c'était un commis boucher.
Combien d'autopsie a-t-il pratiqués ? On a parlé de cent mille ! Il protestait en disant qu'on ne numérote pas ce genre d'opérations comme les canards d'un célèbre restaurant. Mais il était responsable de cette statistique puisqu'il avait lui-même lancé ce chiffre. Ce fut au cours d'un procès qui lui apportera le plus vif étonnement : il est vrai qu'il se déroulait devant la cour martiale américaine en 1950, un G.I. qui avait étranglé une prostituée.
Jamais pris en défaut
La justice américaine est essentiellement pragmatique. Tout doit y être prouvé, même l'évidence. Le Docteur Paul arriva et se présenta comme il en avait l'habitude. Cela ne suffit pas au président qui interroge le Docteur Paul, à peu près comme un stagiaire, lui demandant quelles avaient été ses études, quels étaient ses diplômes. Puis vint une question qui toucha le Docteur Paul au vif :
- "Quel est votre degré d'expérience en matière d'expérience légale ?" demanda le président.
Alors le Docteur Paul chercha la réponse définitive, éclatante. Et la trouva.
- "Cent mille cadavres !" lança t-il d'une voix claironnante.
Il était fort redouté des avocats car il était rare qu'on le prit en défaut. Une histoire est resté célèbre. Elle l'oppose au bâtonnier Henri Robert, l'un des plus fameux avocats de l'entre-deux-guerres. Les deux hommes étaient en province pour un procès. Henri Robert comme défenseur, le Docteur Paul comme expert. Le médecin arrive dans un restaurant et voit assis à une table l'avocat lisant le manuel de médecine légale du Professeur Brovardel, dont le Docteur Paul a été l'élève. Quelle offensive prépare Henri Robert ? Le Docteur Paul cherche dans sa mémoire et ne trouve pas. Il appelle le garçon lui glisse une pièce et lui demande d'aller voir à quelle page est arrêté l'avocat.
- "Page 15" lui rapporte bientôt le garçon.
Le Docteur Paul va au téléphone appelle son cabinet à Paris et se fait lire la page 15 du manuel. L'audience arrive, le Docteur Paul témoigne et avant de finir, se tourne vers Henri Robert :
- "Je sais bien, maître que vous allez me faire une objection. A la page 15 de son manuel, mon éminent maître, le Professeur Bovardel... "
A la sortie, Maître Henri Robert retrouva le Docteur Paul :
- "Tu es étonnant", lui dit-il ", " Non seulement tu connais par cœur les manuels de médecine légale, mais encore leur pagination...
Avec les hommages du gros bouffi
Il avait de l'esprit et s'en servait. Un jour traversant le boulevard du Palais, il manque d'être renversé par une voiture renversée par une voiture conduite par une femme.
- "Gros bouffi", lui lance celle-ci.
Il note le numéro, se fait communniquer l'adresse de la conductrice et lui envoie le mot suivant :
- "Le gros bouffi vous adresse ses plus respectueux hommages et reste à votre disposition : Docteur Paul, médecin légiste."
Il ne manquait pas de courage. En 1943, il est convoqué par Laval. Les Allemands viennent de découvrir le charnier de Katyn. Ils demandent que chaque pays, envoie un médecin légiste.
- "Cela sera toi" , dit Laval au Docteur Paul.
- "Je suis bien fatigué" répond le médecin.
- "Ça m'est égal, tu iras !"
- "D'accord", répond Paul après avoir réfléchi "mais en uniforme de général. J'ai ce grade dans la réserve et avec toutes mes décorations. Je te préviens : j'ai la Military Cross et l'Ordre du Bain (Most Honourable Order of the Bath).
Jamais il ne fut convoqué.
Personne n'est perdu s'il aime les chiens
Cet homme avait une passion dans la vie : les cockers. Il était président du "Cocker Club de France". Avant guerre il avait un élevage qui fut primé à de nombreuses reprises. Une phrase revenait souvent sur ces lèvres :
- "J'ai vu de fieffés gredins dans ma vie" , disait-il, "Aucun n'est complètement perdu s'il aime les chiens".
Les obsèques du Docteur Paul auront lieu vendredi en l'église Sainte-Clotilde.
Article paru dans l'Oise Matin du Jeudi 28 Janvier 1960
Bureaux du Journal "Le Parisien Libéré - L'Oise-Matin " : 18 rue des trois-Barbeaux Compiègne Tél : 940.21.57 & 940.31.85
Médecin-Légiste de Valeur, mais connu surtout comme une grand homme de cœur, simple et bon.
Le Docteur Paul ne comptait que des amis dans notre région.
Une pélerine, un béret, une canne... cela suffit pour tracer une silouette, tout le monde à Vieux-Moulin et dans la région, reconnait le Docteur Paul.
Homme simple et bon, il était estimé et même de tous. Aussi sa brusque disparition laisse t-elle un vide immense. L'annonce de sa mort fit d'abord beaucoup d'incrédules.
"Nous ne pouvions y croire !" nous ont dit plusieurs habitants de la petite commune nichée au cœur de Compiègne, "Et puis, nous n'avons pu nier l'évidence. Quelle perte irréparable pour nous tous !"
"Il y a eu samedi huit jours, je l'accueillais chez moi, comme en chaque fin de semaine, nous a dit monsieur Alain Coadou, proprétaire de l'Auberge "Au Daguet". Il était assis là, à sa place habituelle près de la cheminée. Il était gai, et il ne manquait pas, bien sûr, de blaguer, comme toujours, tandis que je lui servais son "Newrod"...
- Un "Newrod" ?
'- "Oui, c'est un cocktail apéritif qu'il a ainsi baptisé ainsi : un doigt d'apéritif sec, quelques gouttes de cassis et du champagne pour compléter le verre."
La canne posée en travers de la table, près de son béret sur lequel brillent ses deux étoiles de général, une assiette de chips ou d'olives... On imagine aisèment la scène : le Docteur Paul est bien là, son imposante carrure se dessine peu à peu, au fur et à mesure qu'on l'évoque.
Le garde-champêtre, monsieur Pierre Victor, entre dans la salle.
"Ah ! Voilà mon premier ministre !"
Est-ce le Docteur Paul qui vient de parler ? On serait tenté de le croire. C'est ainsi, en effet, qu'il saluait "son brave garde-champêtre" avant de l'inviter à sa table.
Car cet homme illustre, ce savant, devant qui toutes les portes s'ouvraient, ce "grand" qui cotoyait tous les "grands" de ce monde, était très simple. Il aimait les humbles, les considérait comme des égaux, sachant se mettre à leur portée pour leur offrir au besoin ses services.
"Je me souviens, dit madame Coadou, de ce dernier jour de l'An. Il était là. Des ouvriers de ferme sont entrés, venant de leur travail, les vêtements crottés. Il leur tendu la main les saluant d'un cordial : "Alors mon vieux, bonne année !"
Oui, tel était le Docteur Paul. Un "brave homme et un bon vivant", comme l'on dit à Vieux-Moulin.
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Les témoignages des habitants
"Il a fait beaucoup de bien à Vieux-Moulin et nous le regrettons de tout cœur" nous a dit monsieur Abel Rouvière, adjoint.
Monsieur Pierre Victor, garde-champêtre était "le premier ministre" du Docteur Paul.
Lors de notre reportage monsieur Roland Cassarin a "occupé" un instant à l'Auberge du Daguet la place où le Docteur Paul aimait se retrouver pour prendre son apéritif chez "son ami" Alain Coadou.
© photo collection personnelle de Marc Pilot |
Ancien chasseur ( au 13e à Chambéry *, ainsi qu'il le rappelait volontiers), il aimait profiter de la vie et voir les autres joyeux autour de lui. Fin gastronome (il faisait partie du Club des Cent) il aimait la bonne chère.
Une fresque humouristique dans la grande salle de l'Auberge du Daguet, le représente, une tête de daguet à la main, un gigantesque couteau dans l'autre. Et pourtant le Docteur Paul adorait les animaux. A Vieux-Moulin, son chenil abritait parfois une trentaine de petits pensionnaires qu'il avait plaisir à caresser et à choyer.
"Les bêtes, précise monsieur Roland Cassarin, le boulanger, lui rendaient bien son amitié. Mieux encore que les humains à qui il n'hésitait jamais à rendre service. Mais il eut souvent à faire à des ingrats, "Bah ! nous disait-il, lorsque nous en parlions, c'est la vie, passons !"
"Il a fait beaucoup de bien à Vieux-Moulin, renchérit le garde-champêtre en hochant la tête pensivement. Mais il le faisait toujours discrètement, avec un tact parfait et sans attendre de remerciements. Ah ! la commune perd gros !... "
"Oui, nous perdons beaucoup reprend monsieur Abel Rouvière, adjoint. Dans nos assemblées municipales, c'était un conseiller très écouté, aux avis sages. On pouvait ne pas partager ses opinions, mais on ne pouvait pas de ne pas l'aimer et l'admirer.
"Un soir - c'était le soir de l'élection du maire qui n'est autre que madame Pittard, sa fille - je lui offert mon bras pour l'aider à gravir la vingtaine de marches qui mènent à la salle du Conseil.
"Eh quoi donc ! me dit-il presque vexé. Malgré mon gros poids, je peux bien monter tout seul. Je suis encore jeune !... "
Le Docteur Paul avait quatre-vingts ans ! Et pourtant, son caractère lui conservait effectivement une jeunesse extraordinaire.
Et aujourd'hui, à Vieux-Moulin, la peine que chacun ressent au fond de son cœur, est celle que l'on doit éprouver lorsque l'on quitte non seulement un père, mais un fidèle ami...
Suivant les dernières volontés du Docteur Paul, son inhumation aura lieu au cimetière de Vieux-Moulin, après une messe célébrée en l'église de Vieux-Moulin : samedi à 10 heures.
On se réunira à l'église où la dépouille mortelle sera exposée à partir de demain vendredi, à 14 heures.
* 13ème Bataillon de chasseurs à pied à Chambéry
Article paru dans l'Oise Matin du Jeudi 15 Avril 1961
Bureaux du Journal "Le Parisien Libéré - L'Oise-Matin " : 18 rue des trois-Barbeaux Compiègne Tél : 940.21.57 & 940.31.85
La Société Canine de l'Oise, a tenu son assemblée générale le dimanche 9 avril à Compiègne. A l'issue de la réunion, les membres présents se sont rendus au cimetière de Vieux-Moulin, où ils ont rendus hommage au Docteur Paul.
On reconnaît sur notre photo, à gauche : madame Pittard, maire de Vieux-Moulin ; madame Nourry, présidente de la Société, et monsieur Rémond, directeur, pendant l'allocution de ce dernier.
© Collection personnelle Jean-Claude Lécuru
En 1986 par une décision du conseil municipal de Vieux-Moulin le nom du Docteur Paul a été donné au square du jardin de l'ancien cimetière juxtaposant l'église.
Un grand merci à mesdames Colette Pittard, Julie Duffossé-Fourmann et messieurs Jean-Claude Lécuru et Marc Pilot pour l'aide apportée à la conception de cette page consacrée au Docteur Paul.
La carrière du Docteur Paul
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